Transformation numérique et organisation

Il y a quelques dizaines d'années, Henry Mintzberg posait les bases des sciences de l'organisation en recensant les cinq structures qui la composent : le sommet stratégique, la ligne hiérarchique, le centre opérationnel, la technostructure et les fonctionnels. Il y a quelques semaines, l'entreprise américaine Zappos défrayait la chronique en faisant la promotion d'une entreprise sans hiérarchie. Entre la grande société bardée de technostructures et de services fonctionnels et celui de la petite entreprise maigre et musclée, il y une grande distance. Mais le digital est venu brouiller les pistes en rapprochant deux mondes autant qu'en les poussant aux chocs. Beaucoup d'observateurs réduisent la transformation digitale à l'irruption de nouvelles technologies. D'autres soulignent l'avènement d'un nouveau monde composé de « pure players ». La « digitalisation » (affreux néologisme, dont on use par commodité) est à la fois plus complexe et plus diverse que ces seules dimensions. Le digital ne se limite pas aux frontières de la DSI (Direction des systèmes d'information) et transforme ou alimente toutes les fonctions de l'entreprise ! Les métiers business, en premier lieu, se transforment. La fonction commerciale se nourrit d'e-commerce, les départements marketing et la communication sont modifiés par la montée en puissance du « digital branding », des réseaux sociaux du CRM. La finance se dote de nouveaux ERP, les RH deviennent 2.0… Le digital est partout, il est donc l'affaire de tous et en premier lieu du CEO de l'entreprise ! Faut-il un patron du digital, dès lors que « tout est digital » ? Je reparlerai sans doute dans une prochaine chronique de cet animal protéiforme qu'est le « chief digital officer », à la fois gourou, ambassadeur et leader. A court et moyen terme, ma recommandation est de créer ou confirmer cette fonction dans la grande entreprise, car la transformation digitale est encore trop récente et se heurte à trop de résistances en interne.

Pierre Cannet
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