Le secteur de l'e-santé dopé par les lois anti-contrefaçon

Les nouvelles réglementations obligent les laboratoires pharmaceutiques à adopter des solutions innovantes pour marquer les boîtes de médicaments. Le français Adents a su en profiter.

Le marché de la lutte contre la contrefaçon de médicaments s'annonce gigantesque. La nouvelle législation américaine imposant un marquage contraignant des boîtes de médicaments devra être appliquée d'ici novembre 2017 par les laboratoires pharmaceutiques et leurs sous-traitants aux Etats-Unis. Celle de l'Union européenne, dans la même veine, d'ici 2019. 40 pays dans le monde ont déjà légiféré sur le sujet, tous dans le sens d'un suivi accru des boîtes de médicaments, et une quarantaine d'autres s'apprêtent à leur emboîter le pas.

Conséquence de ces réglementations : des milliers de lignes de conditionnement de médicaments doivent être équipées de nouveaux logiciels adaptés, dont 20 000 uniquement en Europe et aux Etats-Unis, à échéance réglementaire. Or ce marché de contrainte ouvert en 2014 aux Etats-Unis avec la promulgation de la loi et en février dernier seulement dans l'Union européenne est encore très faiblement équipé.

Pour s'assurer de leur conformité réglementaire, les laboratoires pharmaceutiques doivent faire appel à un logiciel qui inclut les évolutions législatives et intègre constamment de nouvelles données. Car si la réglementation s'appuie sur le standard international GS1 Datamatrix (un code normalisé qui comporte notamment le numéro d'identification du pays, celui du lot de fabrication, la date de péremption et un numéro unique d'identification), les laboratoires qui exportent dans plusieurs pays doivent s'adapter aux spécificités législatives de chacun : modalités d'attribution du numéro d'identification, mentions additionnelles… Autant de particularités qui ont un impact direct sur le packaging.

Le français Adents, éditeur de logiciels créé en 2007, s'est engouffré dans la brèche et s'est spécialisé sur le secteur après avoir notamment servi la lutte contre la contrefaçon dans le secteur du luxe et du champagne. "Nous gérons l'impression de plusieurs centaines de boîtes par minute, décrit son dirigeant Stéphane Fay. Le logiciel pilote le marquage et le système d'impression, relit les boîtes et trie celles qui sont non-conformes…"

Adents facture un abonnement à ses clients, laboratoires et sous-traitants, en fonction notamment du nombre de réglementations prises en compte. "La demande est telle que nous devons faire appel à des partenaires spécialistes de l'intégration de logiciels pour assurer notre développement", explique Christophe Devins, cofondateur.

La société a levé 25 millions d'euros depuis ses débuts, dont plus de 20 millions ces 18 derniers mois, preuve de l'explosion du secteur. Elle emploie 65 personnes, dont une cinquantaine en France et le reste outre-Atlantique. Car c'est aux Etats-Unis, où l'échéance réglementaire est la plus proche, que les acteurs vont d'abord se livrer bataille. Adents y affronte par exemple l'américain Systech, fournisseur historique de matériel pour le secteur pharmaceutique qui propose désormais une couche logicielle. Laetus en Allemagne ou Optel Vision au Canada présentent un modèle similaire.

Pour se différencier, le Français met en avant son ADN de pur éditeur de logiciel… et travaille sur de nouveaux axes d'amélioration pour lutter efficacement contre la contrefaçon. La technologie blockchain, par exemple, attire l'attention des cofondateurs. "Elle pourrait être très intéressante pour préserver l'intégrité des données utilisées", reconnaît Stéphane Fay, avant de laisser entendre qu'une intégration prochaine pourrait être annoncée. De quoi peut-être faire la différence et s'emparer de la mine d'or de ce nouveau marché.

Aude Fredouelle - JDN
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